En cette période estivale, Mathilde du blog Mordue de Voyages nous a proposé de partir à la découverte d'un lieu de tournage pour #EnFranceAussi. Saviez-vous qu'au cours du XXéme siècle 140 films ont été réalisés dans les Hauts De France, le dernier en date étant la Ch'ti famille de Dany Boon. Pour ce rendez-vous, je me suis laissée inspirer par Germinal, réalisé par Claude Berry en 1993 à la fosse d'Arenberg. Aujourd'hui reconvertie en centre cinématographique, la fosse d'Arenberg aurait été parfaite pour coller au thème de ce mois d'août.
Le bassin minier recouvre environ 1/12éme de la superficie totale du Nord/Pas de Calais. Bien souvent, on associe mine de charbon à la vue des terrils, mais ceux-ci ne sont pas forcément liés. Selon le type d'extraction, soit les résidus miniers formaient un terril (prononcé téri), soit ils servaient à combler les galeries.
Comme rien n'arrive jamais par hasard, il se trouve que j'ai été invitée par le Centre Historique Minier de Lewarde à découvrir la fosse Delloye. De Germinal à la fosse Delloye, il n'y a qu'un pas. En réalité, ils sont distants de 26 kms😉 D'ailleurs à la suite du film en 1993, 168 000 personnes sont venus visiter le Centre Minier de Lewaerde. Il s'agit à ce jour du plus important musée de la mine en France, avec 8 000m2 de bâtiments au coeur d'un site de 8 hectares. Depuis 2009, le site est classé Monument Historique, et depuis 2012, il est inscrit au patrimoine de l'Unesco.
Pour que vous compreniez mieux, les émotions qui m'ont envahi durant cette visite, voici quelques infos qu'il me semble bon de vous communiquer avant de poursuivre votre lecture :
Dans mon enfance, j'allais régulièrement à Loisons sous Lens avec mes parents voir nos amis Jacques et Jocelyne. Mon papa a fait la connaissance de Jacques à Marseille au moment d'embarquer pour l'Algérie, faire la guerre au nom de la France. A leur arrivée à Alger, 23 heures plus tard, ils étaient amis à la vie à la mort. Une amitié qui aura durée 40 ans. Un vrai Chetemi Jacques, avec ma maman on ne comprenait parfois qu'un mot sur trois dans ses phrases. Je garde de nos visites des souvenirs extraordinaires. Comment oublier cette soirée, où j'ai vue 2 amis rire comme des ados, tout en se protégeant de la pluie sous un parasol pour cuire des brochettes au barbecue parce que Jocelyne avait décidé de faire un couscous pour 20 personnes. Jacques avait le chic d'inviter toutes les personnes qu'il croisait dans la journée, ce qui avait le don d'exaspérer Jocelyne, mais qui malgré tout, se mettait en 4 pour accueillir ses convives à bras ouverts. Ils habitaient à quelques pas d'un terril. J'avais toujours hâte de voir ces montagnes noires, le 1er qu'on croisait, se trouvait juste à la sortie d'autoroute peu après Carvin. Je pense que j'ai toujours rêvé secrètement d'en fouler un, de plonger les mains dans ces cailloux, et d'en savoir un peu plus à ce sujet.
Vous comprenez mieux pourquoi, je n'ai posé aucune résistance à l'envie de plonger dans la vie de la cité minière, et partager le quotidien des mineurs et leur famille à travers les quelques 15 000 objets exposés.
Après avoir traversé la salle qui nous explique les origines du charbon, je me suis retrouvée nez à nez avec un immense mineur en bronze, main levé, son casque avec sa lampe frontale visé sur la tête, je me sentais toute petite face à ce puissant symbole et que dire de cette magnifique sculpture représentant une famille de mineur.
Et puis il y a eu ce miroir accroché au mur d'une reproduction de maison d'une cité minière, un bête miroir identique à celui que nous avions à la maison chez mes parents. Et le "coué à charbon" posé à côté du feu, il y avait presque le même chez ma grand-mère maternelle. Dans son feu, il y avait un four dans lequel elle réchauffait des "boter koeke"... finalement tous les objets exposés ne sont pas si vieux, et beaucoup d'entre eux m'ont fait voyager dans mon passé. Mon regard s'est ensuite posé sur un vélo posé contre un muret en béton, suivi de la vision d'un drap tendu sur un fil, il n'en fallait pas plus pour me remémorer les souvenirs de mon enfance cité Windels, ou le jardin de Rachel où j'allais jouer avec Guy, le fils de Jacques. Il ne m'a suffit que d'un regard sur la reproduction d'un estaminet, pour que des effluves d'odeur du tabac froid et de bières brunes réveillent inconsciemment mes sens, me voilà au Coq Hardis, le bar PMU au bout de la rue de chez Jacques.
Je ne m'attendais pas du tout en allant au centre minier de Lewaerde que j'allais plonger dans mes souvenirs.
C'est finalement l'appel micro annonçant le départ de mon groupe pour la visite de la mine que je suis sortie brutalement de ma nostalgie.
⟴ Descente au coeur de la mine
Je jette brièvement un coup d'oeil à la salle de bain, un ancien mineur y partage son expérience auprès d'un autre groupe de visiteurs très attentifs. Mon regard est immédiatement attiré par des vêtements suspendus au plafond, tout y est authentique, cette vue me prend aux tripes.
C'est une jeune fille au sourire communicatif qui nous accueille. Casque vissé sur la tête, elle nous explique le déroulement de la visite, nous donne quelques conseils de sécurité, notamment sur notre descente dans les entrailles de la terre, car nous allons descendre dans la mine.
Ensemble, nous allons suivre l'itinéraire de la journée d'un mineur de fond au cours au cours du dernier siècle, et suivre l'évolution des conditions de travail. Mais avant de plonger au coeur de la fosse, nous passons par la lampisterie afin de mettre nos jolis casques.
Nous ne serons pas équipés de lampes frontales, depuis mère électricité est passée par là, mais je ne peux m'empêcher de jeter un oeil à ces centaines de lampes, objets plus que centenaire, seule source de lumière au coeur des galeries, un compagnon indispensable à nos mineurs d'antan.
Nous empruntons ensuite la passerelle qui nous conduit vers l'ascenseur, une dizaine de mètres et 50 marches plus tard, nous sommes devant celui-ci. Tout autour de nous des wagonnets, du matériel plein de poussière, du charbon, tout est figé mais on imagine très bien le vacarme. que tout cela devait produire lorsque tout était en mouvement.
C'est ici que femmes et enfants qu'on appelait un galibo triaient sans relâche le charbon du shiste.
La descente se fera lentement accompagner du bruit original. Il fallait que cela aille très vite, beaucoup de monde peu de temps. A l'ouverture des portes nous étions devant la galerie qui nous permettrait de voyager au fil du temps, et découvrir les différentes méthodes d'extractions mais aussi les conditions de travail de tous ces mineurs.
La visite fût des plus instructives, entre les anecdotes, la mise en marche des machines, notre guide aura su suspendre le temps. C'est avec presque une petite pointe de regret que j'ai retrouvé le ciel bleu des Hauts De France, j'aurai bien pu déambuler dans les galeries du centre minier de Lewaerde pendant des heures pour m'imprégner encore et encore de la mémoire de ces lieux.
⟴ De l'école à la mine
Mais je n'étais pas arrivée au bout de mes surprises, la mémoire allait prendre la forme d'une rencontre exceptionnelle avec un ancien mineur.
C'est Damien qui m'accueuille la barbe grisonnante, la poignée de main ferme, son histoire c'est celle de beaucoup de familles de la région. A 14 ans, le certificat d'études en poche, il a fait le choix de descendre au fond de la mine suivre les traces de son père. Pendant 3 ans, il sera galibo, alternera entre l'école et la mine, à 18 ans il est mineur de fond, puis finira sa carrière comme agent de maîtrise.
Mais avant cela, il y aura eu ce 1er jour. Ce jour, où on lui a remis son jeton, puis sa lampe, où accompagné de son père, il a franchi la grille de l'enceinte du carreau de la fosse en tenue de travail. Ce jour, où la mine est devenu son quotidien. Il n'était plus un enfant, par encore un homme, mais on comptait sur lui.
L'histoire de Damien résonne en moi, comme celles que me disaient mon papa. Courage, fierté, travail. La rencontre avec Damien fût intense, tout autant que la visite de la mine.
Entre émotions, souvenirs, et chaleur, j'ai voulu prendre un peu mon temps avant de reprendre la route. J'ai profité pour aller me perdre sur le site du carreau Delloye. Entre les anciennes écuries, la gare et la verrière où se trouvent de nombreuses machines, la balade fût des plus captivantes.
J'ai également pu voir une très belle exposition de photos faites dans la région par Thierry Girard qui elle aussi aurait mérité plus d'attention de ma part.
- Le Centre Minier de Lewaerde est à 8 minutes de voiture de Douai, 10 minutes de Lens, compter 45 minutes depuis Lille
- Il se visite seul, en famille, en goupe ou en scolaire mais la visite de la mine sera accompagné d'un médiateur culturel
- Le musée est fermé en janvier,et ouvert le reste de l'année
- La visite complète :musée + expo + galerie + rencontre avec un mineur est à 14€30 (tarid réduit 8€50)
- Ils ont même un tarif famille 2 adultes + 2 enfants 😉
- Vous pouvez vous restaurer sur place au restaurant le Briquet (le nom du repas des mineurs)
- Le parking y est suffisamment grand pour accueillir tout le monde et il est gratuit
Mon avis : j'y suis allée avec mon coeur de nordiste, et j'ai été très surprise d'y découvrir des visiteurs qui venaient de toute la France. Les aléas de la circulations depuis Halluin ont fait que je suis arrivée plus tard que ce que j'avais prévu, et je le regrette parce que j'aurai vraiment voulu passer plus de temps à observer les différents objets, et aussi tous les outils. Il serait intéressant de le combiner avec une visite de terril sur Lens dans la foulée 😉
Merci au Centre Minier de Lewaerde de m'avoir ouvert ses portes dans le cadre d'un partenariat avec le collectif EnFranceAussi en ma qualité d'ambassadrice des Hauts De France. Le contenu de cet article n'en reste cependant pas moins soumis à mes seules émotions.
Je crois que j'ai visité un endroit comme ça en voyage de classe au collège. On pensait qu'on était descendus dans la mine mais en fait non, on ressort au niveau du sol !! J'avais été tellement déçue ! C'est comme ça à Lewarde ? Quoi qu'il en soit ça a l'air d'être une visite passionnante, pleine d'âme. Ca me rappelle la visite des hauts-fourneaux d'Uckange en Moselle.
RépondreSupprimerPour le savoir, il faut venir :)
SupprimerQuelle aventure cette descente dans la mine ! Je trouve toujours ces types de visite passionnants. Merci Chacha pour le voyage dans les entrailles de la terre (et aussi pour les souvenirs du film de Germinal que j'ai vu au cinoche avec mes copains du collège ! Ca remonte à loin tout ça :-) )
RépondreSupprimerC'était avant hier non !!
SupprimerUne visite passionnante c'est vrai
C'est super intéressant, même si ça rappelle des souvenirs douloureux!
RépondreSupprimerMême si les souvenirs sont douloureux, ils rappellent des jours heureux et c'est cela finalement qu'il faut retenir.
SupprimerC'est un endroit rempli d'histoire et d'émotions ! Nous n'avons jamais été dans la mine mais nous aimerions bien découvrir. Merci pour ses photos et ses histoires !
RépondreSupprimerC'est un moment génialà faire au moins une fois
SupprimerQuelle visite passionnante ce doit être ! Toi tu l'as vécue en tant que fille du pays, avec plein d'émotions liées à des souvenirs... Moi je n'ai pas de souvenirs de ce coin de France que je ne connais pas du tout mais plein d'images en tête de ce que je m'imagine de ce territoire minier. La célèbre chanson de Pierre Bachelet résonne dans ma tête, et je me souviens du livre Germinal de Zola étudié en cours de français. Par contre je ne me souviens pas du film... J'espère un jour découvrir cet univers qui fait partie de l'Histoire de France. En attendant, merci pour cette belle découverte !
RépondreSupprimerIl y avait des personnes de Pau qui était de passage dans la région pendant ma visite, j'étais très surprise par leur curiosité au sujet des mines. Quand on est originaire du Nord, on ne s'imagine pas que cela puisse intéresser autant les habitants des autres régions
SupprimerWaou, l'émotion surgit de ton article ! On sent que cette visite a été quelque chose pour toi, avec toutes ces réminiscences de ton enfance.
RépondreSupprimerTu me donnes envie d'y aller en pensant à toi ;)
Si tu pense dans les environs n'hésite pas une seconde fonce !
SupprimerOn devrait prendre exemple sur ce site qui a crée un lieu témoin des trois siècles d'activités minières, pour que personne ne puisse oublier dans quelles conditions travaillaient ces ouvriers. Merci pour ce bel article, cela donne envie d'y aller.
RépondreSupprimerMerci 😊
SupprimerComme Paule-Elise ma fille ne savait pas que c'était une reconstitution, du coup le découvrir lui a fait détester sa visite, l'impression d'avoir été bernée qu'on lui avait menti. Moi je le savais et c'est vrai qu'ainsi on ne regarde pas les lieux de la même façon.
RépondreSupprimerPar contre, à la place de la rencontre avec un mineur nous avions fait le livret jeu pour enfant et c'était très bien fait.
Et nous ne sommes pas du tout du nord, on n'avait jamais vu de terril avant cette visite. Mais ça ne nous empêchait pas d'avoir envie d'aller dans le nord justement rien que pour ça.
Maintenant tout est une question de sécurité aussi. Ma déception n'a durée que quelques minutes parce que j'en ai tellement appris finalement sur la vie de mineur. Je pense que l'important est là.
SupprimerEn regardant ces images, cela paraît à la fois si loin et en même temps si proche! Belle rencontre pleine d'émotion!
RépondreSupprimerJe me suis fait la même réflexion
SupprimerMagnifique article Chacha. Merci d'avoir partager cette douce nostalgie avec nous.
RépondreSupprimerEt moi d'avoir pu partager celle-ci lors de ta vie à Lens
SupprimerJ'y suis allée avec mes élèves il y a deux ans (nous avions couplé avec une visite des terrils), ils avaient adoré! La visite est ludique, intéressante, et ancrée dans le patrimoine des Hauts-de-France! bravo pour cet article!
RépondreSupprimerMerci Chloé <3
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